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Génie de l’environnement Recherche et innovation Le développement durable, l’économie circulaire et les enjeux environnementaux

Des fibres fonctionnalisées biodégradables pour mieux traiter l’eau

Lac

Résumé de l’article scientifique

Le traitement de l'eau est un processus souvent complexe et coûteux pour les villes, impliquant l'utilisation d’une grande quantité de produits chimiques et de grands moyens pour éliminer les impuretés dans l'eau. Pour remédier à cela, des fibres biodégradables – modifiées chimiquement – ont été introduites dans le procédé de purification actuel afin d’en améliorer le potentiel. Comparé au traitement conventionnel (enlèvement des contaminants de 45 %), ces fibres ont réussi à éliminer jusqu'à 33 % de contaminants en plus (78 %) et 60 % de plus de certains types de microplastiques qu'un traitement habituel (80 % vs 20 %, respectivement pour le traitement fibreux et conventionnel). En conclusion, l'utilisation de ces fibres permettrait de capter davantage de contaminants actuellement réfractaires aux usines conventionnelles et réduirait la quantité de produits chimiques nécessaires pour ces industries. Une récente étude du professeur Lapointe publiée dans la très prestigieuse revue Nature Water démontre d’ailleurs que nos usines conventionnelles ne sont pas performantes pour l’enlèvement des nanoplastiques, des particules 1000 x plus petites que les microplastiques [1].

Mise en contexte

Face à la croissance démographique mondiale, il devient crucial de préserver nos ressources en eau potable, qui ne représentent que 2,8 % de l'eau sur Terre. Actuellement, la consommation mondiale de produits chimiques (coagulant) nécessaires à la purification de l'eau est de 25 millions de tonnes par an pour un budget de 18 milliards de dollars, laissant en moyenne 7,8 millions de tonnes de boues toxiques comme déchet pour l'environnement. [2] D'autre part, les installations et la superficie nécessaires pour ce traitement sont tout aussi importantes. Par exemple, la station Jean-R. Marcotte à Montréal est aussi grande que 90 stades de football [3], avec une quantité moyenne de 2,3 millions de mètres cubes traitée quotidiennement. Cela équivaut au volume d’un stade olympique [4], nécessitant l'utilisation importante de matériaux de construction et de plusieurs millions de dollars de budget pour l'achat des produits chimiques.

Pour répondre à ces défis, il est primordial de pouvoir assurer une innovation continue sur notre manière de purifier l'eau du point de vue économique et écologique. Notre approche repose sur l'ajout de matériaux fibreux fonctionnalisées et biodégradables pour capturer plus de contaminants dans l’eau, rendant le procédé de purification plus rapide, plus efficace, plus propre et moins dépendant de produits chimiques, donc moins coûteux.

Le traitement de l’eau par la coagulation, un concept en amélioration continue

Parmi les méthodes les plus populaires de purification de l'eau, on retrouve l'ajout de certains produits chimiques afin d’agglutiner les contaminants présents dans l'eau, formant ainsi des morceaux solides appelés les flocs. Cette étape est appelée la coagulation. L'utilisation de la coagulation comme moyen de purifier l'eau impropre à la consommation n'est pas nouvelle.

Cette étape est suivie par la floculation, qui consiste à aider les flocs formés lors de la coagulation à s'agglutiner davantage entre eux (i.e., augmenter leur taille) et à par la suite les laisser couler par gravité au fond d'un bassin, laissant ainsi l'eau propre et claire en surface. Les flocs qui se sont déposés au fond sont ensuite enlevés mécaniquement. Ce procédé est une méthode courante de traitement de l'eau, que ce soit pour la rendre potable dans les usines ou pour la débarrasser des impuretés avant de la rejeter dans la nature.

La problématique actuelle

Même si de nos jours des installations automatiques et sophistiquées sont utilisées, les limites de cette méthode sont principalement le temps requis afin que les flocs coulent au fond des bassin de décantation et l'espace et les matériaux de construction nécessaires pour construire ces grands bassins. De plus, l’émergence de contaminants relativement récents et difficiles à capter, issus de l'industrie et d’usages domestiques, tels que les microplastiques, complexifie davantage l’opération et le choix final des procédés utilisés au sein des usines. Finalement, les coûts liés à l'achat des produits chimiques représentent également un enjeu.

L’innovation apportée par les fibres

L'innovation dans nos travaux de recherche consiste à ajouter à ce même procédé des fibres biodégradables qui sont modifiées chimiquement afin de capter davantage de contaminants (notamment par adsorption), provenant notamment de papier recyclé et de résidus miniers, renforçant la capacité des coagulants et des floculants à regrouper davantage d'impuretés dans l'eau. Au lieu de former de petits flocs, ces fibres aident à créer des flocs plus grands et plus efficaces, facilitant ainsi la séparation et l'élimination des contaminants de l'eau lors de la décantation – un procédé employé mondialement. On peut les comparer à de très puissants aimants qui collent les contaminants entre eux. Leur mode d'opération est relativement simple : les fibres sont injectées à certaines doses et à des moments très précis au cours de l'opération de purification pour atteindre le maximum de leur potentiel. Elles améliorent de façon importante l'efficacité du traitement de l'eau en augmentant la taille des amas d'impuretés (de 10 à 100 fois plus grande), voir figure 1.

Taille de flocs
Figure 1: Comparaison entre la taille des flocs formés sans fibres (traitement conventionnel) et avec fibres.

De plus, ces fibres réussissent à capter certains types de microplastiques et les fibres de textile (voir figure 2) avec une efficacité entre 20 et 60 % supérieure par rapport au procédé normal utilisé par de nombreuses grandes villes [5]. Enfin, ces fibres permettent de réduire la taille des bassins nécessaires à la décantation des flocs, rendant possible leur substitution par une technologie de tamisage moderne qui filtre l’eau pour obtenir de meilleurs résultats sur une surface plus petite. Cela rend le procédé plus économique et respectueux de l’environnement.

Floc vu au microscope
Floc vu au microscope
Figure 2 : Photos des fibres qui accumulent des microplastiques et des fibres de textile.

Conclusion

Cette innovation permet de réduire, voire d'éliminer, l'étape de la décantation en substituant le bassin de décantation par un tamis rotatif. Cela permet d'économiser des matériaux de construction et de réduire les coûts d'achat de produits chimiques pour les villes. Elle permet également de capturer des contaminants qui étaient autrefois très difficiles à intercepter, garantissant ainsi une eau plus propre, exempte de microplastiques, qui peut être réutilisée pour l’irrigation dans le domaine de l'agriculture. Ceci vise à éviter que ces contaminants ne se retrouvent dans l'assiette du consommateur.

Information supplémentaire

Pour plus d’information sur cette recherche, consultez l’article suivant :

Walid Alioua, Mathieu Lapointe, Fiber-based super-bridging agents enable efficient contaminant removal via settling and screening: Impact on microplastics, textile fibers, and turbidity, Journal of Environmental Chemical Engineering, Volume 11, Issue 3, 2023, 110195,

ISSN 2213-3437.

Sources :

[1] https://www.nature.com/articles/s44221-023-00177-3

[2] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7126837/

[3] https://fondationrivieres.org/coulisses-station-depuration-eaux-usees-montreal-2/?fbclid=IwAR3W6gcI6BfMekYQRGC9dVpZYo-D6NDOmC1JzDWHZTObTIFgqURRsmTVw2M

[4] https://montreal.ca/articles/desinfection-lozone-travaux-la-station-depuration-jean-r-marcotte-27451

[5] https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S221334372300934X