Cartographier le bruit à l’ÉTS : un projet étudiant du cours MEC636
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Le bruit : un facteur important des espaces d’apprentissage
Le bruit peut avoir des effets délétères sur la santé des personnes [1] : perte auditive, perturbation du sommeil, difficulté à communiquer ; effets cardiovasculaires et psychophysiologiques ; réduction des performances ; gêne ; et effets sur le comportement social. En milieu scolaire, le bruit peut aussi avoir un effet sur l’apprentissage, notamment sur la compréhension de la lecture, la mémoire et l’intelligibilité de la parole [2]. Ainsi, plusieurs études se sont intéressées au bruit de campus universitaires [3][4][5] et concluent généralement que les niveaux de bruit sont trop élevés pour ce genre d’environnement dédié à l’apprentissage.
Le campus de l’École de technologie supérieure (ÉTS) est situé en plein cœur de la ville de Montréal (Canada) et est, sans surprise, exposé à un niveau de bruit assez élevé comme le montre la cartographie des niveaux de bruit réalisée en 2014 par Ragettli et coll. [6][7] et présentée à la Figure 1(a). Selon cette carte, les niveaux de bruit dans ce quartier y sont bien supérieurs au niveau maximum de 55 dB(A) recommandé par l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) [1] (recommandation pour les espaces extérieurs des écoles).
Les nuisances sonores de ce quartier central de Montréal sont en effet bien réelles et le bruit sur le campus a été mentionné à plusieurs reprises lors d’une consultation sur le développement urbanistique du campus réalisée en 2018 [8]. Voici, par exemple, quelques suggestions issues de ces consultations « Créer des ambiances sonores reposantes », « Concevoir des murs verts pour contrer la pollution et le bruit », « Construire des havres de paix (atténuer les nuisances sonores) ouverts au public, mais destinés aux employés et aux étudiants de l’ÉTS et conserver ainsi un équilibre entre les besoins des membres de la communauté de l’ÉTS et les résidents du quartier ».
Les environnements acoustiques intérieurs des différents pavillons sont tout aussi importants. Ils doivent être adaptés au contexte d’apprentissage mais aussi favorables au travail de bureau pour tous les membres du personnel du campus. Pour cela, (i) le bruit de fond induit par d’éventuelles sources de bruit extérieures (ex., trafic routier, trafic aérien, usines, activité dans les cours d’école) et intérieures (ex., bruit de ventilation, bruit dans les locaux voisins) et (ii) le temps de réverbération, une mesure de l’ampleur de la réverbération dans un local, doivent être faible. En effet, une réverbération et/ou un bruit de fond excessifs dans ces espaces interfèrent avec la communication orale et constituent alors un obstacle « acoustique » à l’apprentissage.
Une classe du cours « Acoustique industrielle » de l’ÉTS [9] (sigle MEC636) a eu pour mission, dans le cadre d’un projet de session, de réaliser une étude de bruit dans le campus de l’ÉTS pour quantifier plus précisément le bruit dans le campus, contribuer à améliorer les environnements acoustiques et ainsi la qualité de vie de la communauté.
Cartographie du bruit dans le campus ÉTS
La première étape du projet a consisté à étudier le bruit extérieur sur le campus ÉTS. Une cartographie détaillée du bruit a permis d’identifier les zones les plus calmes et les plus bruyantes. Sans surprise, ce campus de centre-ville est assez bruyant, présentant des niveaux de bruit dépassant les recommandations de l’OMS (supérieur à 55 dB(A)) sur la majorité de sa surface (voir Figures 1(c) et 1(d)). Les niveaux de bruit sont plus élevés en journée (avant 16h) à cause des nombreux travaux de construction dans le quartier. Néanmoins, certains secteurs plus calmes ont pu être identifiés et se trouvent dans les cours piétonnes extérieures entre les pavillons et les résidences universitaires.
Analyse du bruit dans les pavillons de l’ÉTS
La seconde étape a consisté à caractériser les environnements sonores de plusieurs locaux des différents pavillons de l’ÉTS (ex., auditorium, salles de classe, cafétéria, bureaux, bibliothèque) et à évaluer leur qualité acoustique. De manière générale, les salles de classes mesurées sont tout à fait adéquates pour l’apprentissage (i.e., bruit de fond inférieur à 40 dB(A) et temps de réverbération inférieur à 0,7 s). En revanche, 50 % des espaces d’apprentissages auxiliaires dépassent les 45 dB(A) (ex., gymnase, cafétéria, atrium, espace collaboratif) et mériteraient des correctifs acoustiques pour améliorer le confort acoustique de la communauté étudiante. Les étudiants du cours ont alors localisé les principales sources de bruit internes aux pavillons à l’aide d’une caméra acoustique (voir Figure 2).
Proposition d’un métamatériau acoustique pour la réduction du bruit des transformateurs électriques
La troisième et dernière étape du projet s’est concentrée sur le bruit de salles électrique et mécanique des pavillons du campus. Ces locaux émettent des bruits qui ont une signature tonale caractéristique et qui peuvent être perçus dans les locaux adjacents et déranger le personnel qui y travaille (voir Figure 3(a)). Les étudiants devaient alors proposer un concept de métamatériau acoustique dédié à l’encoffrement des transformateurs électriques (identifiés comme sources de bruit importante à l’étape précédente) afin de réduire leur éventuelle nuisance dans les locaux adjacents (voir Figure 3(b)). Une simulation du comportement acoustique du métamatériau proposé a permis de montrer que le matériau serait capable d’absorber l’énergie acoustique à quatre fréquences identifiées comme problématiques dans les spectres de bruit mesurés dans ces salles et bureaux voisins (voir Figure 3(c)).
Poursuite du projet
Ce projet a démontré la pertinence d’étendre les mesures de bruit à plus de locaux et sur différentes périodes de l’année. Des mesures subjectives du bruit, obtenues par administration de questionnaires, pourraient aussi venir enrichir les mesures microphoniques et ainsi mieux guider la recherche de solutions pour offrir des environnements acoustiques plus confortables.